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Comment surmonter sa phobie sociale ?

Pour pouvoir guérir d’un trouble, il faut d’abord admettre son existence. Or, l’anxiété sociale (aussi appelée phobie sociale) est un trouble extrêmement sous-diagnostiqué puisque la plupart du temps, elle se déclare dans l’enfance ou l’adolescence. De ce fait, les personnes qui en souffrent ont tendance à décrire leurs symptômes et difficultés comme un trait de caractère plutôt que comme un véritable trouble anxieux. On entend très souvent des phrases comme “j’ai toujours été timide” ou “j’ai toujours eu du mal à socialiser” qui rendent les difficultés auxquelles ils font face presque ordinaires, normales…
phobie sociale

Quelle différence avec la timidité ?

On estime qu’environ 60% de la population est timide et il n’est pas toujours facile de savoir à quel moment les manifestations deviennent pathologiques. D’ailleurs, seulement la moitié des personnes atteintes d’anxiété sociale cherchent à se soigner, en général vers la fin de l’adolescence ou au début de l’âge adulte. Malheureusement, ce n’est que très rarement la phobie sociale elle-même qui amène ces personnes à se soigner. Généralement, ce sont les complications engendrées par le trouble qui les poussent à consulter, comme la dépression ou l’alcoolodépendance.
 
Pour savoir quelle est la frontière entre la timidité et la phobie sociale, il faut penser en termes de handicap. Si une personne est dans l’évitement et la fuite systématique de certaines situations, qu’elle ressent une anxiété si intense qu’elle en est parfois paralysée et si sa vie est réellement impactée par cette anxiété et que la personne en souffre, il est nécessaire d’entamer un travail psychothérapeutique.
Si la personne ressent une anxiété d’intensité légère à modérée et qu’elle parvient à expérimenter la plupart des situations sociales sans que sa vie quotidienne n’en soit perturbée, un travail psychothérapeutique peut-être intéressant pour apprendre à mieux vivre les situations sociales, mais ce n’est pas indispensable.
 
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les femmes ont beaucoup plus de mal à identifier qu’elle souffre d’une phobie sociale et non pas d’un trait de caractère normal puisque, encore aujourd’hui, les normes et stéréotypes de genre attendent d’une femme qu’elle ait une attitude en retrait et une affirmation de soi basse. Beaucoup de personnes considèrent qu’il est normal pour une femme d’être “réservée”, de rougir lorsqu’elle est embarrassée et de renoncer à sa carrière pour s’occuper de sa famille. Il est donc indispensable que les symptômes et les critères diagnostiques de l’anxiété sociale soient plus connus du grand public afin que les personnes en souffrance et leurs proches sachent reconnaitre les signes qui ne trompent pas.

Quel traitement mettre en place ?

Chez les adultes, la prise en charge recommandé est la thérapie comportementale et cognitive (TCC), qui dure généralement quelques mois. C’est le traitement qui est le plus efficace au regard de la littérature scientifique. La TCC pour l’anxiété sociale se compose de plusieurs axes de travail :
 
  • de la restructuration cognitive, qui consiste à questionner et modifier les croyances dysfonctionnelles propres à la phobie sociale (“je suis nul(le)”, “ils vont se moquer de moi”, etc.),
  • des techniques de relaxation, comme la respiration ventrale ou la relaxation musculaire, pour apprendre à gérer les émotions au moment ou elles arrivent,
  • de l’exposition comportementale, pour confronter la personne à ses croyances et les infirmer. Il faut savoir que lorsque nous sommes en situation de stress intense, notre raisonnement logique et intellectuel s’effondre. Le cerveau sous pression perd en grande partie ses capacités de réflexion et passe en mode survie. C’est pour cette raison que les phobiques sociaux vont à tout prix chercher à éviter ces situations. L’exposition va permettre au ou à la patient(e) d’apprendre à gérer ses émotions (notamment grâce aux techniques de relaxation) petit à petit à force de répétition. L’exposition comportementale est souvent une pratique qui peut faire peur aux patients, puisque l’on a tendance à penser que nous allons être “jeté dans le grand bassin” directement. Or, les protocoles d’exposition en TCC sont très strictes quant à la graduation et la hiérarchisation des situations d’expositions à respecter. L’exposition est une pratique qui se veut progressive, et aucun bon psychologue ne force son ou sa patient(e) à se confronter à des situations alors qu’il n’en a pas envie.
  • des techniques d’affirmation de soi (sous la forme de jeux de rôles si possible) pour apprendre au (à la) patient(e) à demander ou refuser de l’aide, formuler ou recevoir un compliment, formuler ou recevoir une critique, parler en publique, etc.
 
Pour rendre la thérapie encore plus efficace, il est tout à fait possible d’utiliser d’autres techniques thérapeutiques et à titre personnel, je travaille énormément sur ce qu’on appelle les “métacognitions” c’est à dire les pensées, réflexions et jugements sur nos propres pensées. Il est souvent utile, dans la phobie sociale, de travailler sur ces métacognitions, car ce sont souvent elles qui vont générer un cercle vicieux en situations sociales. Il est important de faire comprendre à nos patients que “j’ai peur de paraitre ridicule” ne veut pas dire “je serai ridicule”.
 
Des techniques de pleine conscience sont aussi très utiles dans la prise en charge de la phobie sociale.
 
D’autres types de thérapies peuvent également être mis en place, comme la thérapie fondée sur la compassion ou encore des programmes de développement personnel, pour améliorer la confiance et l’estime de soi.
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Faut-il prendre des médicaments ?

Parfois, il arrive que les symptômes soient si sévères, qu’une psychothérapie seule, du moins au début, ne soit pas suffisamment efficace. Les médicaments vont permettre de “lisser” l’anxiété de manière à ce que les techniques proposées plus haut puissent être appliquées sans trop de détresse émotionnelle.
 
Les antidépresseurs sont le traitement de premier choix dans la phobie sociale, et plus spécifiquement les inhibiteurs sélectifs de recapture de la sérotonine (ISRS). Parfois, un traitement ponctuel avec des anxiolytiques peut être indiqué, lorsque des pics d’anxiété intense surviennent ou lorsque les antidépresseurs ne donnent pas les résultats espérés. Il faut tout de même mettre en garde les patient(e)s quant au risque d’accoutumance qui existe avec les benzodiazépines.

Comment faire pour prévenir l’installation du trouble chez les enfants ?

Nous avons vu, au début de l’article, que la phobie sociale s’installait de manière insidieuse le plus souvent dès l’enfance. En effet, certains enfants, dès l’âge de 2 ou 3 ans ressentent déjà de l’anxiété (qui se manifeste par une de la réserve voire de la méfiance) lorsqu’ils rencontrent des situations nouvelles. Cette attitude n’est pas pathologique en soi et disparait généralement de façon spontanée mais elle doit tout de même alerter, car elle peut parfois être un premier signe de développement d’une anxiété sociale.
Dans ces cas-là, il faut être vigilant à certains signes d’alarmes comme un retrait, des difficultés (voire des absences) de socialisation, une dépendance aux parents, une irritabilité, etc… Parfois, une phobie scolaire peut aussi se développer, avec des maux de têtes et des vomissements déclenchés à l’idée d’aller à l’école et de se confronter au regard des autres élèves.
 
Pour les thérapies, encore une fois, les thérapies comportementales et cognitives sont les plus indiquées chez les enfants, avec un protocole adapté en fonction de l’âge. Des interventions en classe et au sein de la famille sont aussi très indiquées, pour intervenir directement dans l’environnement de vie de l’enfant.
 
De manière plus générale, l’école est aussi un excellent moyen de limiter le développement de l’anxiété sociale chez les enfants. Certaines écoles ne mettent plus en avant un modèle d’apprentissage basé sur la compétition entre les élèves, mais misent plutôt sur la coopération et la bienveillance entre eux. En faisant sentir aux enfants que leur participation aux activités sociales est la bienvenue et en les encourageant et félicitant lorsqu’ils essayent, même avec réserve, on leur apprend que les autres ne sont pas des adversaires. C’est la clé d’une socialisation réussie !
Sources et références :
  • D. Servant, Gestion du stress et de l’anxiété
  • D. Servant, Se libérer de l’anxiété et des phobies en 100 questions
  • Cerveau & Psycho n° 102